mardi 15 mars 2011

Contrôle technique ta mère !

Notre hyper-gouvernement - toujours à bloc ! - décide d’instaurer un contrôle technique obligatoire (tous les deux ans) pour les cyclos, mobylettes et autres petits scooters à partir de 2012.

Les études et statistiques disponibles sont pourtant unanimes. Le contrôle technique obligatoire pour les voitures – toujours plus drastique et onéreux - n’améliore aucunement les performances de la sécurité routière, il n'est utile qu'aux professionnels de l’automobile, et accessoirement aux policiers (soumis à des quotas de PV). Même l’effroyable Docteur Got – d’ordinaire partisan de thèses 100% répressives - est d’accord là-dessus, c’est dire. En clair : contrôle technique rime avec pompe à fric. Et le parc automobile étant désormais ferré, nos dirigeants étendent le juteux CT à celui des deux-roues.

Celui-ci a déjà une histoire. Proposé début 2008 par le député UMP Thierry Mariani sous prétexte d’accidentologie, le contrôle technique « spécial motos » se heurta à la fronde des « Motards en colère » (la FFMC) et fut reportée. D’autant plus facilement que les centres n’étaient pas équipés pour le deux-roues, les contrôleurs non formés. C’était le prototype de la nouvelle contrainte ambiguë et bâclée décidée par des technocrates aux abois, puis remballée piteusement aussitôt sortie. Mais en politique, le sentiment de passer pour un con semble faire partie d’une époque révolue ; nos hauts fonctionnaires et leurs divers complices (dont la FFVE) s’entêtent à présenter le contrôle technique deux-roues comme « inéluctable ». Celui-ci est obligatoire dans plusieurs pays d’Europe martèlent-ils. Mais est-ce parce qu’une obligation imbécile sévit ailleurs que nous devons l’adopter ?

La société du contrôle, selon Sarkozy

Ce cérémonial déresponsabilisant n’est qu’une contrainte fiscale et policière de plus pour des cyclomotoristes, et bientôt pour les motards et scootards dont l’immense majorité roule sur des machines entretenues, leur santé étant intimement liée à l’état de leur monture. D’après le rapport MAIDS publié en 2004 par l’ACEM (l’Association européenne des constructeurs de motos) seulement 0,7% des accidents de deux-roues motorisés seraient imputables à une défaillance mécanique. Et parmi ces « défaillances mécaniques » combien auraient été détectées par un "contrôleur" ? Ces nano-chiffres disqualifient cette nouvelle tentative de notre société du contrôle. Et pourtant la mesure nous est imposée ! D’abord via les cyclos.

Le but de l’opération serait - officiellement - d’éradiquer le « débridage » des 49,9cc lequel serait facteur d’accidents selon les « experts » du gouvernement. Mais certains ados auront toujours des comportements transgressifs, tandis que cyclos et petits scooters sont sur la route tout en bas de l’échelle des espèces. Est-ce bien raisonnable de les obliger à se traîner à 45 à l’heure, coincés dans le caniveau, frôlés par les camions ? Même les voiturettes sans permis vont plus vite ! Ce qui est débridé n’est-ce pas plutôt la connerie de nos « experts » ?

Dans notre actuelle dictature administrative, circuler en Vélosolex, en petit Vespa ou en mobylette, nécessite déjà de faire immatriculer sa vieille pétoire, d’y apposer une plaque, et de passer un permis de conduire via une formation de cinq heures dans une auto-école (ASR/BSR) ! Aujourd’hui, nouvelle contrainte : le contrôle technique périodique. Et demain ? Le port obligatoire des casque intégral et gilet jaune fluo ? Le pot catalytique sur les Bleues ? Les clignotants et l'ABS sur les Solex ? Et pourquoi pas un permis vélo tant qu'on y est ?

Ras le bol de cet interventionnisme rapace ! Ces têtes de cire qui empilent les contraintes et mesures coercitives, bafouant au passage le principe de la non-rétroactivité des lois, doivent comprendre qu’il y a un seuil d’acceptabilité sociale à ne pas dépasser. Que plus on génère de la frustration, plus on incite à la transgression...

Faisons comme pour la vignette moto en son temps : refusons cet énième macaron.

lundi 5 avril 2010

Les pigeonniers de la République

Outre la multiplication annoncée des photomatons de la route, un autre type de radars-photos est mis en service cette année : les radars de feux tricolores. Plus utiles dans l’absolu que les flashes d’autoroute, ceux-là seront... camouflés. Et leur principe de laisser perplexe. Car ils promettent surtout de multiplier les situations scabreuses.

D’abord pour les motards et scootéristes, toujours plus nombreux dans le trafic de nos mégalopoles. Ils ne pourront plus remonter les files pour aller se positionner en tête de meute au feu - un réflexe de sécurité autant qu’une façon de s’extirper du flux des voitures. Avec la prolifération des radars de feux, les motards et scootards seront obligés de poireauter en fin de peloton, au risque de se faire compresser par un automobiliste étourdi. Et puis, entre les caisseux traumatisés par les flashes qui vont désormais piler à l’orange – une attitude contraire au Code de la route ! - surprenant les deux-roues qui suivent (notamment sur le mouillé), ou les voitures et camions lancés qui risquent de pulvériser les pauvres deux-roues ayant eux aussi brusquement freiné à l’orange, ces miradors électroniques risquent de photographier… de la charpie aux carrefours. A Los Angeles, au Nouveau-Mexique et à Winnipeg c’est déjà le cas. De sérieuses études montrent que les feux ainsi équipés provoquent plus d’accidents qu’ils n’en évitent.

D’autre part, ces stupides robots favoriseront les embouteillages en punissant les derniers automobilistes intelligents, ceux qui aèrent les carrefours congestionnés, en avançant depuis un feu rouge devenu inutile. Idem, comment faire lorsqu’un policier fera signe de passer pour dégager un carrefour ? Comment faciliter le passage d’une ambulance ou des pompiers ? D’autant que contester ces nouvelles prunes (135 euros, moins 4 points) est plus hard : en cas de condamnation on risque une suspension de permis de 2 mois, et une amende de 200 euros.

D’autres questions se posent…

La mise en service de ces quelque 150 radars de feux (pour commencer) est-elle adossée à un problème d’accidentologie identifié, issu d’une enquête sérieuse ? Non, d'autant que ces radars-photos n'étant pas signalés, on ne voit pas où est leur rôle préventif. Est-ce que des plantons feront le ratio entre « vies épargnées » et nouveaux cartons provoqués par ces radars imbéciles ? Non, toujours. Quid de ce piège bien français qu’est la longueur différente des feux orange suivant les endroits ? On ne sait pas. Ces cybermouchards – sans doute sous Windows Vista ! - se sont mis à délirer à Lyon, Marseille et Toulouse. Les automobilistes spoliés vont se plaindre où, sur casse-toi-pov-con.fr ?

Enfin quel est le rapport entre cette technologie lourde et compliquée (deux photos successives) mais inutile devant les principales causes d'accrochages aux carrefours : vélos s’en-fout-la-mort, piétons encapuchés, distraits ou survoltés, ou périlleux ballet des mendiants aux carrefours, par exemple à Paris ? Ne cherchez pas, aucun.

Alors la France, pays des débilités répressives ?

La vérité est ailleurs, dirait l’agent Scully. Officieusement, ces radars urbains - outre cette nouvelle preuve d'opportunité fiscale - auraient un but propagandiste. Ils seraient implémentés pour contrebalancer des statistiques navrantes, que tout le monde connaît : nos radars routiers sont en majorité positionnés comme des pièges à couillons, dans d’infinies et larges lignes droites, le plus souvent en pleine pampa.

Mais surtout, Nicolas Sarkozy, instigateur de notre système « radars », et connu pour son goût de la chose policière, pense à demain matin. Ces sales bestioles orwelliennes vont être « optimisées ». Elles pourront bientôt se doubler d’une caméra de vidéosurveillance capable de reconnaissance biométrique, du procédé LAPI (balayage automatique des plaques d’immatriculation), en attendant – pourquoi pas ? – le péage automatique et urbain.

En France, le mouchardage technologique est un secteur d’avenir.

samedi 27 mars 2010

Route : la fabrique du chiffre

Selon la publicité officielle les chiffres 2009 de la mortalité routière seraient en légère baisse. Cette statistique obtenue à l’arrache par le ministère de l’Intérieur est un énième bobard destiné à masquer un système de plus en plus contestable…


En début d’année Brice Hortefeux a dégainé des chiffres formidables. En terme de sécurité, peu importe la réalité, tout va mieux. Côté bitume il assure que tout ne va pas plus mal, mais cette fois le (dernier) cow-boy de l’Elysée a senti passer le vent de la balle adverse.

Flash-back : fin septembre branle-bas de combat à l’Intérieur : la mortalité routière 2009 promet d’être en hausse officielle pour la première fois depuis huit ans… alors que le citoyen motorisé subit une vague de répression sans précédent. Voilà qui disqualifie les milliers de radars sarkozystes et la juteuse traque aux motorisés. Vite, il faut des chiffres baissiers avant la fin de l’année. Fastoche. Entre autres astuces et manipulations inavouables il suffira d’inciter les forces de l’ordre à mettre ponctuellement un coup de collier sur une tradition bien française : la conduite alcoolisée de fin de semaine – ce sera fait sur le dernier trimestre 2009 grâce à une circulaire d’Hortefeux (datée du 9 octobre).

Grâce à un mois de décembre « salvateur », l'ONISR, l'Observatoire national interministériel de la sécurité routière annonce début 2010 la nouvelle qui sauve la baraque : pour 2009, baisse de 0.3% des tués de la route. Ouf.

Problème. Cette représentation de la réalité n'est pas la réalité. Sur le terrain, nous avons assisté l’an passé à une hausse des accidents, au moins par kilomètre parcouru. Puisque dans le même temps - selon les chiffres des pétroliers qui viennent de tomber - le trafic automobile continue de décroître. Une tendance nette, amorcée en 2007 (1).

Des chiffres d'accidents d’autant plus préoccupants que la mortalité routière baisse « naturellement » depuis 30 ans grâce – entre autres - aux véhicules plus sûrs, à un parc de véhicules moins transgressifs, à une route mieux partagée…

Résumons : les radars n’ont jamais été si nombreux au bord des routes, la traque aux PV n’a jamais été si féroce, et les résultats sanitaires restent désolants. Rappelons même que la décrue en terme de bons résultats s’est amorcée en 2005, année de l’implantation d’un nombre significatif de photomatons routiers.

Voilà qui confirme si besoin la thèse développée dans mon livre : les radars n’ont pour fonction que celle de ponctionner le quidam, en attendant de tracer et contrôler ses déplacements motorisés. Mais en terme d’accidentologie, les cabinettes sarkozystes sont inefficaces, et même perverses : cette diarrhée répressive agit comme un leurre sur l’action publique, accaparant ses ressources humaines et financières, étouffant toute velléité de (vraie) politique de sécurité routière. Causant finalement, et indirectement, des morts.

(1) Exemple : en 12 ans, la consommation d’essence en France est passée de 15 millions à 10 millions de tonnes.


mercredi 17 mars 2010

Grogne des motards, presse et enfumage...

A l’appel de la FFMC agacée par l’ambiance répressive et les menteries du gouvernement, des dizaines de milliers de motards et scootards ont bloqué les rues et fait rugir les moteurs le 13 mars dernier en signe de protestation. Mais l’enfumage n’est pas là où on l’attendait.

Charles Péot, motard et directeur du Codever, a écrit sur sa page Facebook : « 40 000 manifestants dans 58 grandes villes, 8000 motos dans les rues de Paris et voilà le traitement de cette actu par TF1 : 10 secondes, et France 2 : rien. Les deux chaînes TV nationales nous ont démontré une fois de plus qu'elles sont à la botte du pouvoir. Relayer le message des motards en colère ...serait faire prendre conscience aux automobilistes qu'ils sont rackettés eux aussi, donc surtout, ne pas en parler. Ca pourrait déplaire au gouvernement ! Les médias 4e pouvoir ? Mon cul ! »
C’est dit virilement, mais comment ne pas être d’accord ? Lors de cette journée, nous étions au-delà de la balade manifestive. La mobilisation fut monstre, partout en France. La contestation est raisonnée, étayée. Les manifestants sont excédés. Mais hormis les presse régionale et moto, les retours de la part des « grands » médias sont en effet proche de zéro. Rien la veille, quelques clous le lendemain. A Paris, des milliers de badauds et automobilistes surpris par les blocages, découvrirent une nouvelle fois à quel point les journalistes parisiens sont loin de la rue. On ne peut s’empêcher de penser à une consigne d'un gouvernement désireux d’étouffer « l’affaire », surtout avant les élections régionales. « Consigne » est un grand mot dans la mesure où beaucoup de nos zélés petits miliciens de l’info sont devenus des champions de la censure sans censeur.

Lisez plutôt Bakchich.info qui a relayé la manifestation parisienne. D’ailleurs pub ! Achetez Bakchich Hebdo, la version papier qui vient de reparaître en kiosque (voir photo). Un euro seulement, et une nouvelle mouture agréable à lire, et toujours iconoclaste.

Cliquez ici : Les motards se rebiffent, sur Bakchich.info, un article signé Jean-Luc Nobleaux, d’ailleurs candidat au Pulitzer 2010 avec ce papier de haute volée. Après tout c'est du journalisme gonzo, j'y étais au guidon de mon vieux Vespa !

vendredi 19 février 2010

30 ans, et tout recommence

A l’invitation de la FFMC 89 (La Fédération des Motards en Colère, section Yonne) j’ai donné une conférence suivie d’un débat le 29 février dernier à Charbuy. Quelques jours plus tard, le journaliste Jean-Jules Gaye me donnait l’occasion de m’exprimer - toujours à propos de mon livre - sur TV Auxerre… Cliquer ici.

J’en profite pour remercier ici les motards d’Auxerre et des environs, et notamment Jean-Pierre Yon, Frédéric Roy et Jean-Michel qui ont organisé ce meeting. Anecdote : malgré une active campagne de promotion locale, 90% du public à Charbuy était constitué de motards. Ce qui montre une nouvelle fois à quel point les automobilistes français n’ont aucun réflexe défensif envers l’actuelle répression routière. « Les automobilistes ? Ce sont des "mouveaux", m’écrit avec à-propos l’expérimenté Jean-Marie Glantzen (1) sorte de croisement entre le mouton et le veau ». Inutile de s’étonner de la récurrence du matraquage dont nous faisons l’objet. Tout se passe en silence, les automobilistes sont anesthésiés, tandis que nos habituels contre-pouvoirs pantouflent et/ou relaient le message policier du gouvernement. Dans cette France couchée de 2010, seuls les motards sont encore debout. Et pourtant, eux bataillent depuis les années 80.

Au guidon de ma première moto (une 125 Honda S3 bleue) j'étais des premières manifestations motardes à la fin des années 70, parties du circuit sauvage de Rungis, puis de la place de la Bastille. Ce giga-chahut motorisé fut provoqué par les envolées violemment motophobes de Christian Gérondeau, l'instauration de la vignette moto, les tarifs d'assurance prohibitifs, etc. Nos dirigeants avaient dans l'idée d'éradiquer la pratique de la moto, tout simplement. Ces manifs aboutirent à la création de la FFMC. Ces jeunes « braillards casqués », en blouson de cuir, c’était tout un pan de la jeunesse française. Celle qui renvoya durablement Giscard et ses têtes de cire au musée. Or, la fédération des motards vient de fêter ses 30 ans, et tout recommence.

La FFMC, c'est le dernier îlot de résistance face à la vague répressive. Elle reste forte et fière de son action : suppression de la vignette moto, réduction des péages pour les deux-roues, création de l’assurance La Mutuelle des Motards (pétillante aventure collectiviste), création du circuit Carole, ouverture des circuits aux motards, réforme du permis, innombrables action de formation et de prévention routière, inlassable force de proposition, etc. (2)

Grâce aux motards en colère, les abus sécuritaires ont encore une limite. Les motards effraient nos ministres encravatés, car non seulement ce sont des affranchis insensibles à la propagande officielle, mais ils restent capables de se mobiliser, et bloquer des dizaines de villes en France sur un mot d’ordre. Les motards forment encore une communauté, se saluent sur la route, sont attachés aux dernièrs mètres de liberté qu’ils nous restent. Pour la puissance publique ce n’est pas une population captive et soumise comme celle des "caisseux", c’est au contraire une population hardie, insaisissable, autonome, informée, difficile à cerner.

Exaspérés par l'inflation sécuritaire et fiscale, de plus en plus de motorisés sont gonflés à bloc. Ca tombe bien, l’action est de retour ! La FFMC appelle motards et scootéristes à manifester le 13 mars prochain (voir les RV suivant les villes). Pourquoi ? Pour inciter à légiférer sur la circulation interfile (énième promesse non tenue) et pointer les tartufferies de notre « Sécurité routière » alors que le premier ministre annonce une répression... accrue.

Incidemment, ce chahut programmé devrait rappeler à Nicolas Sarkozy que nous sommes en démocratie, et que c’est lui qui doit avoir peur du peuple, et non le contraire.

Quant à toi lecteur, le 13 mars tu sauras si tu es motard ou... mouveau.

(1) Fondateur de l’ACAREC, l’Amicale des Conducteurs d’automobiles responsables et en colère – site aujourd’hui à l’abandon.

(2) Lire l’aventure extraordinaire de la FFMC et de la Mutuelle des Motards, dans le livre tout juste réédité « Chronique d’une utopie en marche » de Manu Marsetti. 284 pages, 16 euros.

samedi 6 février 2010

Loppsi2 : confiscation automatisée du véhicule

En décembre dernier, Dominique Bussereau, notre préposé aux Transports, paradait à Pékin avec la délégation française, loin du boxon hexagonal : RER A enlisé dans la grève, aéroports perturbés, tunnel de l’Eurostar bloqué…

Sans doute étourdi par le gigantisme de la dictature chinoise, le sous-ministre dilettante nous est revenu de son voyage comme affligé de turista répressive. Il annonce vouloir passer la "surmultipliée" face à un bilan 2009 mitigé en terme d’accidentologie. Et de nous en glisser une belle sous les roues, sortie de la répugnante Loppsi 2, actuellement soumise au Parlement et pondue par Sarkozy Nicolas. Ce "dispositif d’exception" promet entre autres joyeusetés (vidéosurveillance, flicage du web...) d’inciter nos forces de l’ordre à confisquer systématiquement les véhicules des « chauffards » avant de les revendre… au bénéfice de l’Etat.

Pour mémoire, la « confiscation » date de l’ancien régime. Elle touchait les biens des condamnés et de leurs héritiers avant d’être abolie par la Révolution française. Reprise par les Nazis pendant la dernière Guerre mondiale pour racketter les Juifs, cette saisie devenue sanction perdura pour récupérer les armes, les stupéfiants, ou les contrefaçons auprès des gangsters. Plus générale, elle frappe les barons de la drogue, les auteurs de crimes contre l’humanité, ou les terroristes.

Nicolas Sarkozy - en grand démocrate - propose donc que la confiscation policière ne soit plus réservée aux grands assassins et autres génocidaires, mais qu’elle revienne toucher Monsieur Tout-le-Monde. A condition que celui-ci commette - par exemple - un "délit de grande vitesse" (à partir de 40km/h au-dessus de la limitation) au volant de sa voiture ou au guidon de son deux-roues.
Les habituels normopathes et autres pleureuses de sous-préfecture nous expliqueront que c’est bien fait pour les méchants chauffards et blablabla. Mais reste la question de l’empilement sinoque des punitions. Pourquoi en rajouter avec Loppsi 2 alors que les risques pénaux encourus sur la route sont déjà délirants ?

Revue de détail avec le journaliste Jean-Pierre Steiner : « Homicide involontaire : 75 000 €, 5 ans d’emprisonnement, 5 ans de retrait de permis. Blessures involontaires : 2 à 3 ans de taule, 30 à 45 000 €, 5 ans de retrait. Jusque-là pourquoi pas ? Mais c’est ensuite que ça dérape. Un détecteur de radar non autorisé vaut à son possesseur 2 ans de prison, 30 000 € d’amende et 3 ans de retrait. Mettre des mineures des pays de l’Est à tapiner coûte moins cher ! Optimiser le moteur d’un cyclo, même punition : 2 ans à bronzer rayé, 30 000 €. Il vaut mieux carrément voler des scooters ça craint moins. Délit de grande vitesse si récidive : 3 mois de frigo, 1500 €, et 3 ans de retrait ! C’est presque aussi hard que de se faire piquer à dealer le l’héroïne ! »

Cet effarant durcissement de régime était venu ponctuer les glapissements sécuritaires de Jean-Claude Gayssot et Marie-Georges Buffet (PC) en charge des Transports sous le gouvernement Jospin (1997-2001). Voilà qui ouvrait grand la porte à la lourde machine mise en place fin 2003 par Nicolas Sarkozy (alors ministre de l’Intérieur) : le programme « 1000 radars automatiques ». Sept ans plus tard, tandis que 2500 photomatons crépitent au bord des routes, Sarkozy Nicolas nous en remet une tartine, beurrée d’une couche de Loppsi 2.
Rappelons pour la bonne bouche que ces mesures toujours plus coercitives sont disproportionnées : la courbe de mortalité routière baisse depuis… 30 ans.
Résumons. Prison et/ou amendes, annulation de permis, et maintenant saisie du véhicule. Quel est le but inavoué de cette dernière filouterie ? Réponse : outre, fournir des véhicules banalisés aux forces de police, booster un chiffre d’affaire qui fait saliver en haut lieu, celui de la ligne "confiscation de véhicules" (déjà 10 870 497 euros en 2008 !). L'Agence de Gestion des Biens Confisqués vient d’être (discrètement) créée dans ce but.
Nos dirigeants devraient aller au bout de l’idée, jouer franc jeu, et faire passer la "Sécurité routière" sous la coupe du Ministère du Budget.

Cet article a été publié sur Agora Vox


mardi 2 février 2010

De la liberté surveillée à la garde à vue

Effervescence médiatique autour du livre de Matthieu Aron « Gardés à vue ». Le journaliste de France Info y balance un scoop qui me fait sourire : les statistiques policières escamotent les gardes à vue « routières ».

On dénombre en France environ 900 000 GAV (gardes à vue) annuelles, et d’après l’enquête de Matthieu, une sur trois suivrait une « arrestation » routière. Or, ces stats seraient cachées par la puissance publique pour ne pas énerver des automobilistes et motards déjà à cran.
Une information précieuse certes, mais qui ne surprendra que les enfants abonnés à Okapi, les lectrices de Marc Levy, les Martiens ou les hypocrites. Cette info n’étonnera aucun citoyen affranchi. Ceux-là savent que l’emballement du processus de GAV résulte de la politique « routière » à la française.
Dès 2007 Airy Routier explicite ce « système répressif incontrôlé » et prédit l’actuelle situation délétère dans son livre : « La France sans permis ». Le rédacteur en chef du Nouvel Obs’ – dont le pamphlet fut frappé d’indignité par les bien-pensants de l’époque (quasiment toute la presse, déjà) - doit aujourd’hui se marrer en douce à l'évocation de cette « exclusivité » de Matthieu Aron qui semble faire redécouvrir l’eau tiède à tous les simplets du pays.
D’autant que dans « Radars le grand mensonge » j’en remets une couche au sein du chapitre « logique comptable et dégâts collatéraux », confirmant les inquiétants propos d’Airy Routier. Les agents de police interrogés (anonymement) pour les besoins de mon enquête, l’avouent : cette flambée des GAV abusives repose sur la politique du Chiffre imposée aux forces de l’ordre par Nicolas Sarkozy en 2002, sur le harcèlement fiscal et pénal des « usagés » de la route, dont le mitraillage des radars et sa surdélinquance dédiée : conduite en fausses plaques, conduite sans permis, délits de fuite, etc. Dans le chapitre « Police, la position démissionnaire » j’écris : « (…) notre police se concentre sur la délinquance molle, le citoyen motorisé et solvable : en 2008 près de 600 000 personnes ont été placées en garde à vue, c’est 1% de la population française (de + de 13 ans), et ce chiffre augmente encore cette année, tandis que l’IGS croule sous les plaintes pour bavure. ». Peut-on être plus clair ? J’y rappelle en outre que ce dévoiement du travail des policiers et gendarmes favorise la montée de la vraie délinquance. J’y montre pourquoi les statistiques gouvernementales ne sont plus crédibles, comment elles sont pipeautées. Et enfin j’explique que cette escroquerie d’envergure grimée en « sécurité routière » repose sur une manipulation d’opinion rendue possible grâce à la noyade des contre-pouvoirs en France. Bref, sur le sujet tout avait déjà été dit. Matthieu Aron a-t-il cité l'un ou l'autre de ces livres défricheurs dans son opus ? Parions que non, puisque selon son service presse "cette enquête est passionnante car elle évite le procès d'intention". Ha bon mais dans ce cas à quoi bon écrire un bouquin ? Matthieu aurait du faire photographe !
D’ailleurs ce soubresaut déontologique auquel nous assistons de la part des « grands médias » face à ces chiffres déments fait déjà pschitt. Aujourd’hui, retour à l’info, la vraie, à la française : petites phrases de politiques en guéguerre, suite moisie du procès Clearstream, le dernier livre sur Raymond Domenech, la mort du plus vieux chien du monde, la neige en hiver… le tout au milieu des habituels sondages idiots.


Les livres dont il est question :
La France sans permis, Airy Routier, Albin Michel, 2007
Radars, le grand mesonge, Jean-Luc Nobleaux, Tatamis 2009
Gardé à vue, Matthieu Aron, Les Arènes, 2010